Nous avons longtemps vu la douleur comme un système relativement simple. Elle est en fait plus complexe qu’il n’y paraît. La douleur fait office d'alarme utile car dans les cas de blessure potentielle, elle est souvent ce qui nous prévient et protège notre intégrité physique en nous motivant à agir. Mais cette alarme est-elle infaillible?
La douleur fait office système d’alarme
Selon la définition officielle de l’IASP (Association Internationale pour l’étude de la douleur), la douleur est “une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en ces termes.”
De manière simplifiée, la douleur fait office de système d’alarme face à un danger. Ce système est très important voire même vital ! En effet, certaines personnes ne ressentent pas la douleur, cette pathologie s’appelle l’insensibilité congénitale (ou analgésie congénitale). C’est très problématique pour la personne car elle inhibe tous les mécanismes d’action que le cerveau met en place pour réagir face à une douleur. Imaginez par exemple que vous fassiez couler votre bain avec de l’eau trop chaude, vous ressortirez immédiatement votre petit orteil qui a été en contact avec l’eau. Mais les personnes souffrant d’analgésie pourront se plonger en entier dans cette eau, ne sentant même pas que de l’eau trop chaude est en contact avec leur peau. [1]
Le saviez-vous ? La douleur n’est pas proportionnelle à la gravité de la blessure (exemple: le surfeur qui se fait arracher la jambe ne ressent pas de la douleur immédiatement mais seulement après avoir atteint la plage voire même jamais). Ou inversement la personne qui s’entaille le petit doigt avec une feuille de papier et qui ressent une très forte douleur.
Vous pouvez aussi ressentir une douleur dans un membre amputé, cela s’appelle la douleur du membre fantôme. [2]
Pour décrire de façon simple le parcours de la douleur, prenons l’exemple de la main posée par inadvertance sur une plaque brûlante. La chaleur va stimuler les terminaisons nerveuses dans un premier temps sans forcément qu’il y ait une brûlure. Ces terminaisons localisées au niveau de la peau (appelées nocicepteurs, il en existe aussi dans les muscles, les articulations..) vont envoyer une information via des câbles (nerfs) à notre cerveau.
Une fois l'information arrivée au cerveau, en fonction de tous les autres éléments qui lui parviennent, il va produire de la douleur ou d'autres événements comme une augmentation de la contraction musculaire, une augmentation de la fréquence cardiaque... et parfois même des éléments opposés comme des sensations agréables.
Le saviez-vous? Dans cet exemple précis, la main a été dégagée avant même le décryptage du signal de chaleur, par le cerveau! Ce phénomène est dû à un arc réflexe présent au sein de la moelle épinière, siège des premiers systèmes de modulation de la douleur. [3]
La douleur aiguë joue donc un rôle important de protection de notre organisme, contrôlée par notre cerveau.
Le système d'alarme pas toujours infaillible
Le système d’alarme décrit précédemment peut être déréglé. Plusieurs chercheurs et l'Association Internationale d'Étude des Douleurs pensent que ces dérèglements pourraient expliquer la persistance de certaines douleurs. Lorsque la douleur persiste plus de 3 mois, on parle de "douleurs chroniques".
L’alarme continue de sonner alors qu’il n’y a plus de danger pour le corps ou encore le seuil de cette alarme est très bas et se déclenche donc rapidement.
La douleur est bien réelle mais c’est l’alarme qui est perturbée. La bonne nouvelle est que cette hypersensibilité à la douleur est un processus réversible et que nous pouvons agir sur notre cerveau et le reste de notre système nerveux. Ainsi il est possible de le modeler et le muscler par des exercices appropriés et ainsi développer une plus grande capacité à faire des choses de manière confortable
Retenons que :
- la douleur fait office de système d’alarme qui permet notre survie
- C’est le cerveau qui produit de la douleur ou non
- Ce système n’est pas infaillible et peut être dérégléSources :
[1] Vlaeyen, Johan W.S.*; Crombez, Geert; Linton, Steven J. The fear-avoidance model of pain https://journals.lww.com/pain/Fulltext/2016/08000/The_fear_avoidance_model_of_pain.5.aspx
[3] https://www.inserm.fr/dossier/douleur/#:~:text=Selon%20la%20d%C3%A9finition%20officielle%20de,ou%20d%C3%A9crite%20dans%20ces%20termes%22.